Quelle est la rentabilité d'une stratégie de dépistage génétique du cancer du sein ou de l’ovaire en population générale ? Les derniers tests de dépistage « élargis » des gènes du cancer du sein, mis en œuvre chez toutes les femmes âgées de 30 ans et plus, pourraient être une stratégie rentable, conclut cette analyse britannique, présentée dans le Journal of the National Cancer Institute. Une base de réflexion pour les politiques en santé publique.
Les chercheurs du Cancer Research UK Bart's Centre de la Queen Mary University London montrent que le dépistage des mutations génétiques bien connues pour augmenter significativement le risque de cancer du sein ou de l'ovaire chez toutes les femmes âgées de plus de 30 ans peut être plus rentable que le dépistage basé sur les antécédents familiaux actuels. La technologie a beaucoup progressé et ces tests génétiques sont devenus bien moins coûteux, aux alentours de 200 €. Ici, les chercheurs estiment que si 71% des femmes subissaient ces tests au Royaume-Uni, jusqu'à 17.500 cancers de l'ovaire et 64.500 cancers du sein pourraient être évités, et plus de 12.000 vies seraient sauvées.
Il s’agit d’une étude de modélisation visant à comparer les coûts des tests de dépistage actuels disponibles du cancer du sein et de l'ovaire et des traitements associés en cas de résultats positifs avec les coûts de ces nouveaux tests et traitements génétiques. La rentabilité a été évaluée en termes d'années de vie ajustées sur la qualité (QALY), qui estime à la fois la qualité et la durée de vie.
Actuellement, les femmes présentant des critères cliniques forts et des antécédents familiaux de cancer supérieurs à 10% se voient proposer un test génétique (test BRCA1 / BRCA2). Les chercheurs ont comparé ce protocole de dépistage, à la mise en œuvre des nouveaux tests génétiques élargis (tests pour BRCA1 / BRCA2 / RAD51C / RAD51D / PALB2) pour toutes les femmes âgées de 30 ans. Les données de prévalence des mutations génétiques en population générale ont été recueillies à partir de différentes publications scientifiques et données d’institutions de santé dont le National Cancer Institute (US). Les chercheurs ont comparé la rentabilité en QALY pour les populations du Royaume-Uni et des États-Unis, pris en compte les coûts du conseil génétique et fait l’hypothèse que 71% des personnes ayant subi le test le prendraient en compte.
Les chercheurs constatent que ce nouveau protocole de dépistage chez les près de 27 millions de femmes britanniques de plus de 30 ans constitue bien une stratégie rentable par rapport au mode de dépistage actuel et coûterait environ 25.000 € de plus par an par année de vie QUALY supplémentaire.
- Cela signifierait, pour chaque femme, entre 7,5 et 9,3 jours de vie supplémentaire ;
- cela permettrait d’éviter 523 décès dus au cancer du sein/million de femmes ;
- cela permettrait d’éviter 461 décès dus au cancer de l'ovaire/million de femmes ;
- cela coûterait environ 4 milliards d’euros par 20 millions de femmes.
Une option de dépistage plus rentable aussi : ainsi, selon l’analyse, ce type de test génétique mis en œuvre en population générale est plus rentable que l’analyse des critères cliniques ou de l'histoire familiale. En effet, les chercheurs estiment que les critères cliniques de routine et les antécédents familiaux manquent environ 50% des porteurs de mutations. Des résultats essentiels qui pourraient bien orienter les politiques en matière d'allocation des ressources de santé pour aider à prévenir le cancer du sein et de l'ovaire.
Il resterait néanmoins à relever le défi pratique consistant à offrir un conseil génétique à toutes les femmes …
Source: Journal of the National Cancer Institute January 18 2018 DOI: 10.1093/jnci/djx265 Cost-effectiveness of Population-Based BRCA1, BRCA2, RAD51C, RAD51D, BRIP1, PALB2 Mutation Testing in Unselected General Population Women
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