L’efficacité du cannabis contre les nausées est bien documentée, en particulier en cas de nausées liées aux traitements du cancer, cependant peut-on l’utiliser sans danger pendant la grossesse, en cas de nausées matinales ? Cette étude de l’Université d’Auburn (Alabama) souhaite en dissuader les femmes enceintes, car l’exposition in utero est bien néfaste pour le cerveau de bébé. Des données sans surprise-car on connait également les effets du cannabis sur le cerveau en développement-, présentées à la Réunion Experimental Biology 2019, qui révèlent ici des problèmes de comportement et de mémoire chez l’enfant.
Avec la légalisation croissante du cannabis à des fins récréatives ou médicales, de plus en plus de femmes en consomment pendant la grossesse, en partie en raison de cette capacité du cannabis à soulager les nausées matinales. Ainsi, précisent les chercheurs, la consommation de cannabis pendant la grossesse a augmenté de 62% entre 2002 et 2014 aux Etats-Unis. Cette étude, menée chez l’animal, met en lumière les effets de l'exposition au cannabis sur le cerveau d'un fœtus en développement. De précédentes recherches ont montré que les enfants nés de mères ayant consommé du cannabis pendant la grossesse sont plus susceptibles de développer des problèmes de comportement ainsi que des troubles de l’apprentissage et de la mémoire. Cette étude vient donc confirmer ces résultats, tout en précisant comment la substance altère les connexions cérébrales de l'hippocampe, le centre d'apprentissage et de la mémoire du cerveau.
L’équipe de recherche a élevé plusieurs groupes de rats et exposé certaines des femelles à un produit chimique de synthèse qui active les mêmes protéines que le cannabis pendant la grossesse. Les chercheurs ont utilisé une dose équivalente à une consommation modérée à forte chez les humains. En examinant le cerveau des bébés rats, ils ont découvert que
- les connexions, ou synapses, entre les nerfs de l'hippocampe étaient réduites chez les petits exposés au cannabis synthétique ;
- après un examen plus approfondi, les chercheurs identifient une réduction des molécules d'adhérence des cellules neuronales (NCAM), une protéine importante pour le maintien des connexions neuronales et d'une force synaptique appropriées.
- L’étude montre également que l'effet observé chez les enfants varie en fonction :
- du trimestre de grossesse au cours duquel ils ont été exposés,
- de la dose et de la voie d'administration chez la mère,
- de l’âge de l’évaluation cognitive.
Restaurer les connexions neuronales ? Les résultats suggèrent qu'il serait peut-être possible de contrecarrer ces effets en augmentant les niveaux des molécules d'adhérence cellulaires mais des recherches supplémentaires seront nécessaires non seulement pour valider ces résultats chez les bébés humains ainsi que la restauration possible des connexions neuronales. Cependant, l’étude ouvre tout de même l’espoir de pouvoir restaurer la mémoire des enfants exposés au cannabis pendant la grossesse, en corrigeant ce mécanisme spécifique par lequel surviennent ces troubles de l'apprentissage et de la mémoire.
Au final, si les effets délétères sur le cerveau de l’exposition in utero au cannabis sont confirmés, il est encore trop tôt pour conclure sur la restauration possible de la fonction des molécules d'adhérence cellulaires. Il vaut donc mieux s’abstenir…
Source: Experimental Biology 2019 9-Apr-2019 Marijuana for morning sickness? It's not great for baby's brain
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