Cette analyse dose-réponse menée par des chercheurs de l’Université de Swansea suggère que les femmes enceintes qui prennent un type spécifique d'antidépresseur (ISRS) au début de leur grossesse ont un risque faible mais significativement plus important d'avoir des bébés présentant des anomalies congénitales majeures. Et un risque également plus élevé de mortinatalité. De nouvelles données au débat de longue haleine sur les effets, chez le nouveau-né, d’une exposition in utero aux antidépresseurs. Une décision très éclairée de traitement de la dépression maternelle pendant la grossesse s’impose.
La dépression touche 7 à 19% des femmes enceintes et le recours aux antidépresseurs pose alors non seulement la question des effets sur la grossesse mais aussi celle du risque de troubles du développement chez l'Enfant. Ce traitement de la dépression consiste fréquemment en inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS), des médicaments considérés comme bien tolérés et sûrs pendant la grossesse. Jusqu'à 5% des femmes enceintes seront traitées par ISRS durant leur grossesse. Cependant, des études aujourd'hui nombreuses, sur l'animal et sur l'Homme ont montré que l'exposition précoce aux ISRS peut entraîner des modifications infimes dans la structure du cerveau du fœtus et altérer la signalisation neuronale. Cette exposition in utero entraîne également un effet secondaire bien connu sur le nouveau-né, caractérisé par des problèmes respiratoires pendant les tout premiers jours de vie. En outre, quelques études ont montré que l'exposition du fœtus aux médicaments augmente son risque de dépression dès l'enfance. Jusque-là, la prise d'antidépresseurs durant la grossesse ne semblait pas accroître directement le risque de décès de l'Enfant, ni de retard de croissance, cependant d'autres risques ont déjà été documentés, dont la prématurité, la prédisposition de l'enfant à l'obésité. Une étude a également documenté l'effet de l'exposition in utero aux antidépresseurs sur le risque de développer un trouble du spectre autistique (TSA). Bref, les recherches se poursuivent…
Ici, un consortium d'universitaires du Royaume-Uni, du Danemark et de la Norvège analyse les données de plus de 500.000 nourrissons et constate que les femmes ayant reçu des ISRS, au premier trimestre de leur grossesse ou 3 mois avant la grossesse sont à risque faible mais significatif d'avoir un bébé présentant des anomalies congénitales (dont une cardiopathie) ou mort-né :
– lorsque les ISRS n'ont pas été prescrits, 6 grossesses sur 200 aboutissent à un résultat défavorable d'anomalie congénitale majeure ou de mortinaissance,
– lorsque les ISRS ont été prescrits, l'incidence est réduite à 7/200.
Un vrai problème de Santé publique, commentent les chercheurs en raison de la sévérité des effets secondaires sur le bébé et en regard de la prévalence de ce traitement chez les femmes enceintes. Ils appellent donc les professionnels de la santé d'examiner toutes les femmes qui demandent des prescriptions d'ISRS et pas seulement celles qui prévoient une grossesse, et en cas de prescription, de surveiller plus étroitement l'évolution de la grossesse avec un accès privilégié aux examens permettant de détecter les anomalies cardiaques chez le bébé. Dans le même temps, les auteurs rappellent que les femmes sous traitement ne doivent pas cesser de prendre leur traitement sans consulter leur médecin.
December 1, 2016 DOI: 10.1371/journal.pone.0165122 Selective Serotonin Reuptake Inhibitor (SSRI) Antidepressants in Pregnancy and Congenital Anomalies: Analysis of Linked Databases in Wales, Norway and Funen, Denmark
Lire aussi:
GROSSESSE: Les antidépresseurs affectent aussi l'activité cérébrale du bébé –
GROSSESSE: Pourquoi les antidépresseurs allongent le cordon –
GROSSESSE et ANTIDÉPRESSEURS: Quand la dépression passe de la mère à l'enfant –
GROSSESSE: L'antidépresseur paroxétine associé au risque de malformations congénitales –