Cette équipe de l’Université Augusta (Géorgie) révèle comment des cellules immunitaires de la mère, les lymphocytes T, peuvent exacerber les complications de la prééclampsie. Alors que la prééclampsie peut entraîner des conséquences à vie pour la mère et l’enfant, en particulier chez la mère un risque très accru de maladie cardiaque et d’accident vasculaire cérébral (AVC), cette nouvelle compréhension du rôle des lymphocytes T dans la prééclampsie, mais aussi de toute une cascade de dysfonctionnements, va permettre le développement de nouvelles thérapies, qui atténuent cette réaction excessive, pro-inflammatoire et pro-oxydante. Avec l’espoir de pouvoir atténuer l’impact du syndrome chez la mère et chez son bébé. Ces travaux ont été successivement publiés dans les revues Pregnancy Hypertension : An International Journal of Women’s Cardiovascular Health et Acta Physiologica.
Les lymphocytes T, des cellules immunitaires qui normalement nous protègent, semblent jouer un rôle clé dans le développement de la prééclampsie : ces cellules immunitaires clés semblent contribuer à un cercle vicieux dans lequel le placenta ne développe pas une voie de passage adaptée pour que le sang de la mère, qui regorge de nutriments essentiels et d’oxygène, atteigne le bébé. La tension artérielle de la mère augmente pour tenter de forcer le passage des nutriments essentiels. Une inflammation et des lésions tissulaires se développent; les cellules T accourent pour aider, mais développent plutôt l’inflammation, induisant un dysfonctionnement aggravé des vaisseaux sanguins et des lésions rénales chez la mère, ce qui accroît aussi le risque de naissance prématurée ou d’autres complications pour le bébé.
La prééclampsie caractérisée par un stress pro-inflammatoire et pro-oxydant ?
C’est donc l’hypothèse, avec cette réaction excessive des cellules T, de l’auteur principal, le Dr John Henry Dasinger, chercheur et de son équipe, du Medical College of Georgia : dans cette hypothèse, les cellules T « normalement » protectrices recrutent encore plus de cellules T qui produisent encore plus d’espèces réactives de l’oxygène (ROS), qui, à ce niveau excessif, sont toxiques. Les vaisseaux sanguins se resserrent davantage et la production du puissant dilatateur des vaisseaux sanguins, l’oxyde nitrique est considérablement réduite.
Les cellules T, nouveau facteur de prééclampsie ? On connaissait déjà plusieurs facteurs de risque de prééclampsie, dont l’hypertension (HTA) et l’obésité maternelle, cependant cette étude en révèle un nouveau, à travers des expériences menées chez la souris, modèle d’HTA avec un régime riche en sel. Les scientifiques constatent qu’environ la moitié de ces souris développent spontanément une prééclampsie avec un régime pauvre en sel et que chez ces animaux, les cellules T qui se déplacent dans le placenta et les reins de la mère produisent suffisamment de ROS pour être problématiques et augmenter le risque de prééclampsie.
Les lymphocytes T sont donc bien identifiés comme un nouveau facteur, cependant, il reste à savoir s’ils sont déjà activés ou s’ils le deviennent en raison de problèmes tels que le flux sanguin insuffisant. Toujours chez les souris modèles, les animaux qui n’ont pas de lymphocytes T ou ne peuvent pas générer de ROS survivent à la prééclampsie.
Un dysfonctionnement vasculaire ? Les chercheurs constatent, avec la prééclampsie, une diminution de la capacité naturelle de la mère à former et à dilater les vaisseaux sanguins. Ce dysfonctionnement vasculaire pendant la grossesse explique au moins en partie le risque élevé de problèmes cardiovasculaires chez la mère plus tard dans la vie : « Ce dysfonctionnement vasculaire pendant la grossesse ne va pas tout simplement disparaître ensuite ».
Ainsi, pendant la grossesse, les petites artères en spirale qui se forment de l’utérus vers le fœtus en développement, sont censées devenir de plus grands vaisseaux qui vont permettent un approvisionnement suffisant pour répondre aux besoins du bébé en pleine croissance. Mais dans ce cas, les vaisseaux ne se développent pas correctement en taille ou en nombre et la mère augmente sa pression pour essayer de compenser ce manque d’approvisionnement.
Et le dysfonctionnement rénal ? Caractéristique aussi de la prééclampsie, le dysfonctionnement rénal et le risque accru de maladie rénale chronique vient exacerber encore les problèmes d’hypertension artérielle et le risque de troubles cardiovasculaires dont d’AVC. « Les reins de la mère travaillent plus fort et grossissent plus que la normale pour soutenir également le bébé. Dans la prééclampsie, leur effort est encore accru car ils doivent travailler contre une pression artérielle élevée ».
Des conséquences sévères chez le bébé : les bébés de mères atteintes de prééclampsie ont également un risque accru de problèmes cardiovasculaires tout au long de la vie, car leurs principaux organes ont déjà été mis fortement à l’épreuve au cours du développement, notamment par la diminution des apports en nutriments vitaux et en oxygène.
Ces bébés sont ensuite plus vulnérables aux facteurs de stress qui surviennent plus tard dans vie, comme l’hypertension et l’obésité.
Sources :
Acta Physiologica April 2021 DOI : 10.1111/apha.13662 Dietary influences on the Dahl SS rat gut microbiota and its effects on salt-sensitive hypertension and renal damage
Pregnancy Hypertension : An International Journal of Women’s Cardiovascular Health June 2021 DOI : 10.1016/j.preghy.2021.04.002 Dietary protein source contributes to the risk of developing maternal syndrome in the Dahl salt-sensitive rat